74e anniversaire de la victoire du 8 mai 1945

mai 8, 2019 dans A la une, A vos côtés, Actualités par Catherine Baratti-Elbaz

Discours du 74e anniversaire de la victoire du 8 mai 1945

Monsieur le Président du Comité d’entente des associations d’anciens combattants du 12e arrondissement,

Mesdames et Messieurs les membres des associations d’anciens Combattants,

Mesdames et Messieurs les anciens résistants,

Monsieur le Commissaire,

Madame la Députée,

Mesdames et Messieurs, les élus,

Mesdames et Messieurs de la chorale,

Mesdames et Messieurs,

Après plus de 2 000 jours de combats et de souffrances, 9 mois après la Libération de Paris, la seconde guerre mondiale prend fin il y a 74 ans en ce 8 mai 1945.

Cinq longues années d’exactions et de massacres durant lesquelles l’Europe fut mise à feu et à sang.

En ce jour férié et chômé, obtenu de longues luttes par les anciens combattants, nous sommes réunis ici pour commémorer la victoire de l’Europe contre elle-même, contre ses propres divisions et ses déchirements fraticides.

Ce 8 mai 1945, dans l’euphorie générale, les premiers défilés s’improvisent sur les Champs-Elysées.  A 15h, comme Notre-Dame de Paris, les cloches de toutes les églises de France sonnent à la volée la fin de la seconde guerre mondiale en Europe. L’Allemagne a signé sa reddition, sans conditions. A la radio le Général de Gaulle en fait une annonce solennelle : « La guerre est gagnée. Voici la victoire. C’est la victoire des Nations Unies et c’est la victoire de la France. L’ennemi allemand vient de capituler devant les armées alliées de l’Ouest et de l’Est. »

Les parisiens pavoisent les immeubles aux couleurs des Alliés, alors qu’une « marée humaine » de civils et de militaires, français et américains, laisse éclater sa joie dans une communion fraternelle qui submerge les rues de la capitale.

Les 8 et 9 mai 1945, des cérémonies se déroulent à l’Arc de Triomphe, décoré pour l’occasion du V de la victoire. Un vibrant hommage est rendu aux combattants, aux vainqueurs et aux victimes du conflit sur la tombe du Soldat inconnu, fleurie des nombreuses gerbes, déposées successivement par le général de Gaulle et diverses délégations.

Le soir venu, les Parisiens prolongent les festivités de la journée par un bal en plein air sur les places illuminées de la ville.

Le 9 mai 1945, les réjouissances de la veille se poursuivent de façon plus solennelle par une cérémonie religieuse célébrée par le nouvel archevêque de Paris en la cathédrale de Notre-Dame.

Les Champs-Elysées, l’Arc de triomphe comme notre Dame de Paris sont devenus au fil de notre histoire, des lieux emblématiques de la communion nationale. Ce lien maintenu, envers et contre tout, entre la République, et ces lieux de la capitale est intense.

Cette intensité, nul ne l’incarne mieux que le général de Gaulle qui en a fait aussi bien lors de la Libération de Paris, que lors du 8 mai 1945, les décors privilégiés de la célébration des victoires de la France et de son peuple. Vingt-six ans plus tard, le général de Gaulle fera de nouveau de Notre-Dame « le cœur de la France », selon l’expression de Victor Hugo. Ses obsèques nationales, retransmises en « mondovision », seront suivies par plus de 300 millions de téléspectateurs. Jamais, jusque-là, Notre-Dame n’a été vue au même moment par autant de monde.

Cet arc de triomphe est lui consacré à perpétuer le souvenir des victoires des armées françaises et honorer les victimes civiles et militaires. Après la seconde guerre mondiale, le symbole de la Flamme s’enrichit d’une charge nouvelle, celle de l’espérance dans l’avenir et le destin de notre Pays.

Voir ces édifices de notre patrimoine, attaqués par une violence inédite ou les flammes d’un incendie, nous a plongés dans une émotion forte qui dépasse largement nos frontières. Ces images violentes nous ont rappelé à quel point notre  « civilisation a la même fragilité qu’une vie » comme le disait Paul Valéry.

Les choses que l’on croyait définitives peuvent parfois s’effondrer subitement.

Le 8 mai 1945, Bruxelles, Londres, Paris, connaissent à l’unisson une journée de folie et de joie collective. Mais cette paix retrouvée ne sera jamais acquise définitivement.

Elle est le fruit des efforts et sacrifices du passé. Il faut encore la défendre aujourd’hui avec clairvoyance, volonté et ténacité.

Depuis les lendemains de la Seconde Guerre Mondiale, la construction européenne nous a apporté 70 ans de paix. L’Europe a permis ce miracle historique entre les ennemis héréditaires d’hier.

Demain nous fêterons l’Europe. Le 26 mai, tous les citoyens européens sont appelés aux urnes pour élire leurs représentants. Je formule le vœu qu’ils soient très nombreux à venir réaffirmer leur attachement à cette belle utopie européenne et à la paix héritée de la guerre. Car chaque nouvelle génération doit s’engager de toutes ses forces contre l’obscurantisme, pour la préserver. Partout en Europe résonne la fascination du nationalisme. A ce nationalisme je souhaite opposer les mots de Louis Chedid que nous chantera la Chorale dans quelques instants : « sans eux, sans elles, on ne serait pas la moitié de nous-mêmes ».

Souvenons-nous de ceux venus des colonies, du monde entier, issus de toutes les origines et de toutes les cultures pour délivrer la France, avec ces mots magnifiques d’Aragon écrit en hommage aux exécutions des 22 membres du groupe Manouchian, dont Tchakarian dernier survivant nous a quitté en aout 2018.

« Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps

Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant

Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir

Vingt et trois qui criaient la France en s’abattant »

C’est Julien Lauprêtre, jeune enfant du 12e, qui reprendra le flambeau de Manouchain, après avoir partagé sa cellule une nuit en prison. Le Président du Secours Populaire nous a quitté il y a quelques jours, et nos pensées accompagnent sa famille en cette journée du souvenir de tous ceux et toutes celles qui ont su dépasser leurs destins personnels pour sauver l’honneur de la France. Pour lui comme pour Aragon, il s’agissait d’unir toutes les forces de la nation, les communistes autant que les chrétiens, pour lutter contre l’envahisseur et se libérer de la tyrannie.

« Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas

Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au cœur du commun combat

Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas »

74 ans après la victoire, mais plus encore demain, ayons cette force de nous retrouver inlassablement, pour continuer à écrire cette partition inachevée de la paix en Europe.

Je vous remercie.