« Les querelles avec la Région sont stériles » Mon Interview au Journal du Grand Paris

février 6, 2017 dans A la une, Non classé, Presse et web par Catherine Baratti-Elbaz

« Les querelles avec la Région sont stériles »

Retrouvez mon interview au Journal du Grand Paris, publié le  5 février 2017

Catherine Baratti-Elbaz, maire du 12e arrondissement de Paris et présidente du groupe des élus PS et divers gauche de la métropole du Grand Paris, décrit les enjeux de la métropole et son devenir. Elle évoque également les grands projets d’aménagement de la Capitale.

Quel bilan tirez-vous 12 mois après la naissance de la métropole du Grand Paris ?

Nous avons réussi la première phase, celle de l’installation institutionnelle de la métropole et nous avons commencé à prendre les premières décisions et à assumer les premières compétences. Le bilan que je tire au bout d’un an est très positif. L’échelle de vie du Grand Paris existe déjà pour nos concitoyens. Ma première conviction est que les maires sont légitimes à travailler ensemble sur ce territoire et à dessiner un avenir commun. Je suis frappée par notre capacité à dépasser les clivages partisans, pour faire primer l’intérêt général. Il y a un an, je n’aurai pas cru que nous pouvions être aussi pertinents et efficaces si rapidement.

Est-ce que cette gouvernance partagée va résister à la montée en charge de la compétence d’aménagement au niveau de la métropole ?

C’est le défi de cette seconde année. Nous avons réussi, au cours de notre première année, à lancer l’appel à projets « Inventons la métropole », à prendre une série de décisions, financières notamment. Certes, il y a eu des polémiques autour de la fermeture des berges de la Seine par exemple, mais les élus métropolitains, sous l’impulsion du président Patrick Ollier, ont tous suivi les orientations de la métropole sur ses compétences relatives au développement durable et à la lutte contre la pollution de l’air.

Effectivement, l’aménagement, le logement, l’habitat et l’hébergement constituent des sujets historiquement plus clivants entre la droite et la gauche. Cela représente un nouveau défi, renforcé en cette année électorale, peu favorable au consensus politique. En même temps, tous les élus métropolitains constatent aujourd’hui des inégalités territoriales inacceptables. Tous savent que l’on ne peut pas continuer à construire une métropole et à améliorer la qualité de vie de nos habitants respectifs en cultivant et en entretenant ces disparités. Nous avons déjà commencé à avoir des débats sur ces questions, liés au schéma régional de l’habitat et de l’hébergement.

Vous souhaitez que la métropole s’occupe également d’hébergement d’urgence ?

Oui, nous avons porté un vœu pour que la commission logement et habitat s’intéresse à cette question. Aujourd’hui, c’est l’État qui désigne les communes sur lesquelles des bâtiments sont transformés en centres d’hébergement d’urgence. Les maires se retrouvent souvent devant le fait accompli et doivent ensuite assumer l’accompagnement local de ces décisions, auprès de leur population notamment. Aujourd’hui, ces hébergements se concentrent toujours dans les mêmes villes et coûtent cher à l’État. J’ai proposé que l’on avance sur les usages intercalaires, utilisations temporaires de locaux provisoirement inusités. Cela permettrait d’assurer une rotation des lieux d’hébergement d’urgence sur l’ensemble du territoire. Je souhaite également que l’on fasse appel à des professionnels associatifs pour gérer ceux-ci. Ils savent en effet installer des conditions décentes d’accueil et accompagner ces publics. Ces occupations intercalaires permettent de répondre à l’urgence humanitaire et sociale et laisse le temps aux élus d’accompagner les projets auprès de la population, sans que des bâtiments restent vides.

Sur le schéma régional d’habitat et d’hébergement, la métropole va-t-elle donner un avis défavorable ?

Certains, dont je fais partie, considèrent qu’il y a des choses positives dans ce SRHH, et des objectifs forts en termes de logements dans lesquels nous nous retrouvons. Mais on ne peut pas légalement se faire imposer un quota par territoire par la Région. Le groupe que je représente aurait plutôt souhaité un avis favorable avec réserve, mais celui soumis au vote sur proposition du président sera défavorable. Les débats auront lieu le 10 février prochain.

Anne Hidalgo n’aurait-elle pas dû demander leur avis aux élus métropolitains avant de fermer les voies sur berges rive droite ?

Elle l’a fait. J’ai participé, sous la précédente mandature, où j’étais chargée des questions de déplacements à toutes les réunions de concertation sur l’évolution des berges portée par Bertrand Delanoë et reprise par Anne Hidalgo. Les dernières ont eu lieu au printemps dernier. En vérité, ce que nous avons fait sur les berges, c’est ce que tous les maires de la métropole voudraient faire chez eux, et c’est ce qu’ils font. Tous piétonnisent ou apaisent leur cœur de ville. C’est aussi un moyen d’inciter les usagers à réinterroger leurs modalités de déplacement. Le taux de motorisation à Paris est extrêmement bas, deux tiers des foyers parisiens ne possèdent pas de voiture et cette proportion est sensiblement égale en petite couronne. Partout où il existe des modes alternatifs à la voiture, les gens délaissent cette dernière. L’effort consistant à tirer nos lignes de métro, de bus et à construire des trams porte ses fruits. Et je suis très fière que la métropole, parmi ses premières décisions de financement, ait choisi les projets de franchissement des grandes portes de Paris, en créant des itinéraires cyclables et piétons.

Comment jugez-vous l’attitude de la nouvelle présidente de la Région, notamment vis-à-vis de la métropole ?

Avec une grande tristesse. Ces querelles sont stériles et indignes des attentes de nos concitoyens. On devrait être capables de dépasser les clivages partisans. La ville de Paris contribue plus qu’elle ne devrait mathématiquement le faire au Syndicat des transports d’Ile-de-France (Stif), alors que la majorité des usagers des transports en commun de la Capitale ne sont pas des Parisiens. Et la région Ile-de-France, malgré l’ampleur de ses moyens financiers, menace de ne pas financer le bus à haut niveau de service sur les quais rive droite, ceci après nous avoir expliqué qu’il fallait développer les transports en commun en parallèle de la piétonnisation des berges de Seine… Je pense que Valérie Pécresse s’inscrit hélas dans une approche partisane. Selon moi, il en va de la responsabilité des élus de ne pas réorienter toutes les politiques publiques en fonction de la couleur politique des maires des communes. Sur le logement social, la décision annoncée pour le budget 2017 d’exclure le périmètre de la métropole des financements régionaux se chiffre en millions d’euros en moins pour nos bailleurs. Une manne qui va nous manquer pour construire des logements sociaux mais aussi pour entretenir le parc social existant. Du fait de l’opposition de Valérie Pécresse à Paris et à la création de la métropole, les politiques publiques sont pénalisées. C’est dangereux.

Que pensez-vous du débat sur la suppression de la métropole et des EPT ?

L’avenir de la métropole est un débat qu’il faudra que nous ayons dans le cadre des échéances nationales à venir. Mais même si l’on détruisait la métropole, les maires continueraient à travailler ensemble. En tant que maire d’arrondissement, je travaille quotidiennement avec mes homologues des communes limitrophes, quelle que soit leur couleur politique. Rien ne pourra empêcher les maires de travailler ensemble.